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Déjà ne filtraient plus dans les sables brûlants ;
Dans le sein amaigri de la plaintive mère,
Du lait se tarissait la source nourricière ;
Les coursiers haletants sur la terre tombaient,
Et les pauvres croisés par milliers succombaient.

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Mais déjà du zéphyr je sens la douce haleine ;
Antioche à mes yeux déroule au loin sa plaine.
Nos guerriers, en ces lieux, après de longs malheurs,
Purent enfin calmer leurs mortelles douleurs.
Coteaux de ma Belgique, ô campagnes fleuries,
Délicieux vallons, verdoyantes prairies,
En contemplant l’Asie et ses ombrages frais,
Ses joyeuses brebis broutant l’herbe des prés,
Les héros brabançons, en ce lointain rivage,
Croyaient revoir alors votre riante image.

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C’est dans cette forêt au ténébreux détour,
Où jamais du soleil ne pénètre le jour,
Que Bouillon, se livrant au plaisir de la chasse,
Du gibier poursuivait l’insidieuse trace,
Quand soudain apparaît un ours énorme, affreux ;
La colère, du monstre illumine les yeux ;
Il déchire un croisé sous sa griffe sanglante ;
Il voit Bouillon, il ouvre une gueule effrayante ;
Ce guerrier, à l’aspect du terrible animal,
Sur lui pousse au galop son rapide cheval ;
D’un bond impétueux le monstre le devance,
Et sur notre croisé, comme un trait il s’élance ;
Le coursier du héros recule épouvanté,
Et son maître sous lui tombe précipité ;
Mais ranimant l’ardeur de son bouillant courage,
Et de son agresseur en méprisant la rage,
Soudain Bouillon saisit son adversaire affreux ;
Il le presse, il l’étouffe entre ses bras nerveux ;
Indomptable lutteur, il l’ébranle, il l’atterre,
Et dans sa profondeur la forêt solitaire,
Du monstre a répété les longs rugissements.