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APPENDICE
(Extraits de la Relation des Jésuites pour l’année 1660.)

Quarante de nos Hurons qui faisaient l’élite de tout ce qui nous restait ici de considérable, conduits par un capitaine assez fameux, nomme Anahotaha, partirent de Québec sur la fin de l’hiver, pour aller à la petite guerre, et dresser des embûches aux Iroquois, à leur retour de la chasse. Ils passèrent par les Trois-Rivières, et là six Algonquins se joignirent à eux, sous le commandement de Miti8emeg, capitaine de considération. Étant arrivés ensuite à Montréal, ils trouvèrent que dix-sept Français, gens de cœur et de résolution, avaient déjà lié partie dans le même dessein qu’eux, s’immolant généreusement pour le bien public et pour la défense de la religion. Ils avaient choisi pour leur chef, le sieur Dollard, homme de mise et de conduite : et quoiqu’il ne fût arrivé de France que depuis assez peu de temps, il se trouva tout-à-fait propre pour ces sortes de guerre, ainsi qu’il l’a bien fait paraître, avec ses camarades, quoique la fortune semble leur avoir refusé la gloire d’une si sainte et si généreuse entreprise.

Nos sauvages heureux de grossir leur nombre d’une bande si leste et si résolue, s’embarquent pleins d’un nouveau courage, et, nos Français se joignant à eux, rament avec joie, dans l’espérance de surprendre au plus tôt l’ennemi. Leur marche se faisait de nuit pour n’être point découverts, et les prières étaient réglées tous les matins et tous les soirs, s’adressant tous à Dieu publiquement, chacun en sa langue ; de sorte qu’ils faisaient trois chœurs bien agréables au ciel, qui n’avait jamais vu ici de si saints soldats, et qui recevait bien volontiers des vœux conçus en même temps, en français, en algonquin et en huron.