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après le rêve, le réveil

jusqu’aux moyeux et c’est à grand peine que les occupants, cahotés de droite et de gauche, parvenaient à rester dans la voiture. La voirie laissait fort à désirer en 1837 ; le chemin public, pour peu qu’il fut un bas-fond, servait de dépotoir aux habitants qui y érochaient leurs terres riveraines et accumulaient sur ces cailloux la relevée des fossés. L’eau des pluies délayait cette boue qui dissimulaient les roches, les trous et les ornières où les chevaux pataugeaient et boulangeaient comme dans une bouette qui, à la sécheresse de l’été, devenait dure comme pierre mais à surface sinuée, encavée, raboteuse ou pointaient des cailloux. Le chemin de La Barbue est resté légendaire !

Au lieu de continuer tout droit jusqu’à l’intersection du chemin de Granby, on prit à gauche par le rang des Lemire qu’on suivit jusqu’au trait carré où, en obliquant un peu à droite, on reprenait la route qui contourne la montagne. Il passait midi quand on arriva à Saint-Pie.

À cet endroit, il devait y avoir relai. Phydime Malo devait ramener à Saint-Marc l’équipage mis à la disposition des fugitifs par M. Drolet. Un autre serviteur de ce dernier, Célestin Parent, allait prendre la place de Malo et se tenir à leurs ordres.

À Saint-Pie, nos pseudo-chasseurs se rendirent chez Charles Drolet, fils de Toussaint, et patriote non moins ardent que son père. On s’y attabla et comme on n’avait presque rien mangé depuis la veille, on fit honneur à l’hospitalité du maître de céans.

Pendant que nos voyageurs ont dépouillé toute contrainte, que leurs traits se détendent, que leurs physionomies sont au naturel, que, sous la vivifiante chaleur de l’amitié et sans doute, de quelques réconfortantes rasades de jamaïque, la glace du découragement a fondu peu à peu et que le cœur a repris confiance, faisons plus ample connaissance avec les convives tout en respectant leur incognito.

Disons tout de suite que tous quatre — car nous ne parlons