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les deux sexes ; mais, dans ces jours où l’on a le tort de jouir sans prévoyance, il seroit pourtant assez sage de faire quelques provisions pour les années plus importantes de la vie, où la réflexion vient remplacer les sens refroidis : cependant Rousseau, trop suivi en cela par les autres écrivains qui l’ont imité, n’a cessé de répéter avec beaucoup de chaleur, que toute l’éducation des Femmes devait tendre à un seul point : de les rendre agréables.

Raisonnons un peu avec les personnes de cet avis, qui se piquent d’avoir quelques connaissances du cœur humain ; croyent-elles que le mariage puisse déraciner les habitudes ? La Femme instruite uniquement à plaire, trouvera bientôt que ses charmes ne sont plus que les tièdes rayons d’un soleil d’hiver, et qui ne peuvent avoir beaucoup d’effet sur le cœur d’un époux qui les voit tous les jours, quand l’été a fait place à une saison plus froide. Aura-t-elle alors assez d’énergie naturelle pour chercher des ressources et des consolations en elle-même, et tirer parti de ses facultés qu’elle a laissé dormir ? N’est-il pas plus vraisemblable qu’elle essayera de plaire à d’autres hommes,