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diables à figure humaine qui aiguillonnent un pauvre bœuf jusqu’à le rendre fou, ou fouettent l’âne patient, chancelant sous un fardeau au-dessus de ses forces, cette Femme si sensible n’en laissera pas moins son cocher et ses chevaux l’attendre des heures entières, exposés aux rigueurs d’un froid piquant, ou aux torrens de pluie qui battent des jalousies bien closes où ne peut pénétrer le moindre air, pour l’avertir combien le vent soufle avec violence ; et celle qui partage son lit avec ses chiens, et les soigne avec une sensibilité d’ostentation lorsqu’ils sont malades, laissera ses enfans croître dans une pension avec des difformités. Des faits dont j’ai été témoin viennent à l’appui de mon raisonnement. La Femme que j’ai eu en vue ici, étoit belle, et passoit pour telle près de ceux qui s’inquiètent peu de l’esprit, quand une Femme est fraîche et agréable. Son intelligence n’avoit pas été détournée des devoirs de son sexe par les lettres, et son innocence n’avoit pas été altérée par les connoissances. Elle étoit Femme dans toute la force du mot, et loin d’aimer les animaux qui remplissoient la place que ses