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ble. C’est ainsi que, dénuée de toute émulation, et n’ayant pas d’autres moyens de se soutenir, la prostitution devient son unique ressource. Le caractère se déprave bientôt par des circonstances sur lesquelles la pauvre malheureuse n’a qu’un bien foible pouvoir, à moins qu’elle ne possède une portion peu commune, de jugement et d’élévation d’esprit. Les hommes ne sont pas dans le même cas : la prostitution n’est pas pour eux l’écueil de leur vie. Quoiqu’un nombre infini de Femmes deviennent vicieuses par systême, leur dépravation est le plus souvent le fruit de l’oisiveté dans laquelle on les a élevées, en les accoutumant à regarder l’homme comme leur soutien, et à se persuader qu’elles lui doivent leur personne en échange. Des airs licencieux et le code du libertinage fournissent alors de plus puissans aiguillons que le besoin ou la vanité, et cette observation est propre à renforcer l’opinion dominante, qu’en perdant la chasteté, une Femme perd tout ce qui la rend respectable ; sa réputation dépend de l’observation d’une vertu, quoique l’amour soit la