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Femme bornée, cœur froid (cette supposition n’est pas déplacée, car la manière actuelle d’élever les Femmes n’est pas plus favorable à leur cœur qu’à leur esprit) la Femme, dis-je, est jalouse de l’affection, bien tiède pourtant, que son mari témoigne à ses parens ; et sa sensibilité ne s’élevant pas jusqu’à l’humanité, elle voit avec dépit la propriété de ses enfans prodiguée à une belle-sœur sans ressources.

Voilà des faits positifs que j’ai vus et revus. Qu’arrive-t-il ? La Femme a recours à la ruse pour étouffer une tendresse qu’elle n’ose combattre ouvertement ; elle n’épargne ni larmes, ni caresses, jusqu’à ce qu’elle ait éconduit de chez elle la personne qu’elle regarde comme un espion, une surveillante incommode. L’infortunée se trouve jettée dans le monde, sans être préparée à en éviter les pièges ; ou bien, le frère, croyant faire un grand effort de générosité ou consulter la décence, rélègue la pauvre fille avec une chétive pension dans une triste solitude, dont le peu de culture qu’elle a reçu n’adoucira pas l’ennui.