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donné à son corps toute la vigueur dont il est susceptible ; son esprit, se développant en même tems, est parvenu par gradation à connoître les devoirs moraux de la vie ; à savoir en quoi consistent la vertu et la dignité humaines.

Elevée de la sorte en remplissant les devoirs de son état, elle se marie par inclination, toutefois sans imprudence et sans perdre de vue les suites du mariage. Elle s’assure le respect de son mari, avant qu’il soit nécessaire de s’industrier pour lui plaire, et pour nourrir une plante mourante que la nature condamne à périr quand l’objet en devient familier, quand l’habitude et l’amitié prennent la place d’un sentiment plus ardent : c’est la mort naturelle de l’amour, et la paix domestique n’est pas détruite par les efforts qu’on fait pour la prévenir. Je suppose aussi que le mari est vertueux, car, s’il ne l’est point, la Femme a un plus grand besoin de l’indépendance des principes.

Toutefois le sort vient rompre ses nœuds : la voilà veuve et peut-être avec peu de ressources ; mais elle ne perd point le courage : elle sent son malheur sans en être