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66. Maintenir la petite bourgeoisie, c’est maintenir le régime allemand actuel. La suprématie politique et industrielle de la bourgeoisie capitaliste menace cette petite bourgeoisie d’une ruine certaine, d’abord par suite de la concentration des capitaux, puis parce qu’elle enfante un prolétariat révolutionnaire. Le socialisme « vrai » lui paraissait anéantir à la fois le capitalisme et la prolétarisation ; et d’une pierre, en l’utilisant, on faisait deux coups. Il se répandit avec la vitesse d’une épidémie.

Ce n’était qu’un vêtement tissé de la trame légère de la spéculation, broché de fleurs de rhétorique et de bel esprit, trempé comme d’une rosée de sentimentalité enfiévrée et tendre. Sous cette enveloppe éthérée, les socialistes allemands cachaient le squelette misérable de leurs « vérités éternelles ». Mais leur marchandise s’écoulait avec vitesse sous cette enveloppe.

De son côté, le socialisme allemand considéra de plus en plus comme sa mission de se faire l’avocat grandiloquent de cette petite bourgeoisie.

La nation allemande fut proclamée par lui, la nation normale, le philistin allemand fut proclamé l’homme normal. À chacune des bassesses de cet homme il donna un sens caché, profond et socialiste qui permettait de l’interpréter en sens contraire. Il alla au bout de sa pensée en s’élevant contre l’école communiste « brutalement destructive », et en faisant valoir l’impartialité avec laquelle il planait au dessus de toutes les luttes de classes. À peu d’exceptions près,