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la lutte des classes en france

La bourgeoisie française avait depuis longtemps résolu le dilemme posé par Napoléon : Dans cinquante ans l’Europe sera républicaine ou cosaque.[1] Elle avait depuis longtemps résolu la question par la « République cosaque ». Ce n’était pas une Circé qui avait, par des charmes néfastes, défiguré en un monstre le chef-d’œuvre qu’était la République bourgeoise. Cette République n’a perdu que l’apparence de la respectabilité. La France actuelle se trouvait déjà toute faite dans la République parlementaire. Il suffisait d’un coup de baïonnette pour faire crever la bulle et pour que le monstre sautât aux yeux.

Pourquoi le prolétariat parisien ne s’est-il pas soulevé après le 2 décembre ?

La chute de la bourgeoisie était seulement décrétée, le décret n’avait pas encore été exécuté. Toute révolte sérieuse du prolétariat lui aurait aussitôt rendu quelque vie, l’aurait réconciliée avec l’armée et aurait assuré aux ouvriers une nouvelle défaite de Juin.

Le 4 décembre, le prolétariat fut poussé à la lutte par des bourgeois et des épiciers. Le soir de ce jour, plusieurs légions de la garde nationale promirent de se jeter dans la bataille en armes et en uniformes. Le bourgeois et l’épicier avaient en effet découvert que Bonaparte, dans un de ses décrets du 2 décembre, abolissait le secret du vote : il

  1. En français dans le texte.