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le xviii brumaire de louis bonaparte
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Barrot. Elles s’unirent toutes aux bonapartistes pour faire déposer une proposition indéterminée et lâche : « Les représentants soussignés dans le but de rendre à la nation le plein exercice de sa souveraineté déposent la motion de revision de la constitution ». Mais ensuite ils déclarent unanimement par la bouche de leur rapporteur, Tocqueville, que l’Assemblée n’avait pas le droit de proposer l’abolition de la république ; seule la Chambre chargée de la revision en avait le pouvoir. D’ailleurs la constitution ne pouvait être revisée que par voie légale et si les trois-quarts du nombre des voix prescrites par la constitution décidaient la revision. Après six jours de débats bruyants, le 19 juillet, la revision fut repoussée comme on pouvait s’y attendre. 446 voix se prononcèrent en sa faveur, mais 278 contre elle. Les orléanistes avérés, Thiers, Changarnier votèrent avec les républicains et la Montagne.

La majorité du Parlement se déclarait ainsi contre la constitution, mais la constitution elle-même prenait parti en faveur de la minorité et tenait sa décision pour valable. Mais le « parti de l’ordre » n’avait-il pas le 31 mai 1850, le 13 juin 1849 subordonné la constitution à la majorité parlementaire ? Est-ce que toute sa politique intérieure ne reposait pas sur la subordination des paragraphes de la constitution aux décisions de la majorité parlementaire ? N’avait-il pas laissé aux démocrates la superstition en la lettre de la loi, supers-