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la lutte des classes en france

de la collision attendue. Enfin le parti de l’ordre cherchait avec angoisse à éviter, à affaiblir, à assoupir tout conflit décisif avec le pouvoir exécutif. Par crainte de perdre les conquêtes arrachées à la révolution, il en abandonnait les fruits à ses rivaux. « La France demande avant tout du repos ». C’était le cri que le « parti de l’ordre » adressait à la révolution depuis février ; c’était le cri que Bonaparte, dans son message, lançait au « parti de l’ordre. » « La France demande avant tout du repos ! » : Bonaparte commettait des actes qui conduisaient à l’usurpation ; mais le parti de l’ordre perpétrait le « désordre » en faisant du bruit sur ces entreprises et en les commentant avec hypocondrie. Les saucisses de Satory seraient restées muettes comme des carpes si personne n’en avait parlé. « La France demande avant tout du repos ! » Bonaparte voulait donc qu’on le laissât tranquillement faire et le parti parlementaire était paralysé par une double crainte : la crainte d’évoquer de nouveau le désordre révolutionnaire, celle de paraître lui-même un fauteur de désordre aux yeux de sa propre classe, aux yeux de la bourgeoisie. Comme la France demandait avant tout du repos, le « parti de l’ordre » n’osait pas, Bonaparte ayant émis dans son message des paroles de paix, y répondre par la Guerre. Le public qui s’était flatté d’assister à de grands scandales à l’ouverture de l’Assemblée nationale fut trompé dans son attente. Les députés de l’opposition qui récla-