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la lutte des classes en france

haute cour de Bourges une première fois contre les révolutionnaires du 15 mai, l’autre fois contre les démocrates du 13 juin ; dans les deux cas il s’agissait d’un attentat contre l’Assemblée. Aucun des ministres de Bonaparte ne contribua davantage à discréditer l’Assemblée, et après le 2 décembre 1851, nous le retrouvons vice-président du Sénat en titre et chèrement payé. Il avait craché dans la soupe révolutionnaire afin que Bonaparte puisse la manger.

Le parti démocrate-socialiste, de son côté, semblait courir uniquement après des prétextes pour remettre en question son propre succès et l’émousser. Vidal, un des représentants de Paris nouvellement nommé, avait été en même temps élu à Strasbourg. On le poussa à renoncer à son élection à Paris et à opter pour Strasbourg. Au lieu donc de donner à sa victoire un caractère définitif, de contraindre ainsi le « parti de l’ordre » à la lui disputer aussitôt dans le parlement, au lieu de forcer l’adversaire au combat au moment où le peuple était plein d’enthousiasme et où l’armée venait de se prononcer favorablement, le parti démocratique fatigua Paris pendant les mois de mars et d’avril par une nouvelle agitation électorale. Il fit se dépenser ainsi les passions populaires surexcitées dans la répétition de ce jeu électoral provisoire. Il habitua l’énergie révolutionnaire à se satisfaire de succès électoraux, à se consumer en petites intrigues, en déclamations vides, en