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la lutte des classes en france

consolide la domination qu’il exerce en commun, il renforce aussi les moyens d’action que Bonaparte peut mettre au service de ses prétentions dynastiques ; il augmente les chances qu’a le prince de faire avorter violemment la solution constitutionnelle au jour décisif. Par rapport au « parti de l’ordre », Bonaparte ne s’attaquerait pas plus à l’un des piliers de la constitution, que le parti de l’ordre ne l’avait fait, par rapport au peuple, en votant la loi électorale. En un mot, la solution constitutionnelle met en question tout le statu quo politique. Et derrière le statu quo mis en péril, le bourgeois apercevait le chaos, l’anarchie, la guerre civile. Il voit menacés, le premier dimanche de mai 1852, ses achats et ses ventes, ses effets, ses mariages, ses contrats notariés, ses hypothèques, ses rentes foncières, ses loyers, ses profits, tous ses contrats, toutes ses sources de revenu. Il ne peut courir ce risque. Une fois le statu quo en péril, toute la société bourgeoise est en danger de ruine. La seule solution possible, au sens de la bourgeoisie, est l’ajournement de la solution. Cette classe ne peut sauver la République constitutionelle qu’en violant la constitution, en prolongeant le pouvoir du président. Tel fut aussi le dernier mot de la presse de l’ordre après les interminables et profonds débats auxquels elle se livra sur les « solutions » après la session des conseils généraux. Le puissant « parti de l’ordre » se vit donc, à sa honte, obligé de prendre au sérieux la personnalité