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abolition du suffrage universel
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mains de la Banque, l’accumulation de l’or français dans ses caves amenèrent M. Proudhon à conclure que la Banque devait dépouiller sa vieille peau et se métamorphoser en une banque populaire à sa mode. Il n’avait pas besoin de connaître l’histoire de la crise de la Banque d’Angleterre de 1799 à 1819 ; il n’avait qu’à porter ses yeux au delà de la Manche pour voir que le phénomène qui lui paraissait inouï dans l’histoire de la société bourgeoise était des plus normaux dans cette société ; mais seulement il se produisait en France pour la première fois. On voit que les soi-disant théoriciens révolutionnaires qui, à Paris, grondaient après le gouvernement provisoire étaient tout aussi ignorants de la nature et des résultats des mesures prises que ces messieurs du gouvernement eux-mêmes. Malgré la prospérité commerciale et industrielle dont la France se félicite momentanément, la masse de la population, les 25 millions de paysans, souffrent d’une grande dépression. Les bonnes récoltes ont, en France, abaissé le prix du blé plus encore qu’en Angleterre, et la situation des paysans, endettés, saignés à blanc par l’usure, écrasés d’impôts ne peut qu’être rien moins que brillante. L’histoire des trois dernières années a montré à satiété que cette classe de la population est tout à fait incapable d’une initiative révolutionnaire quelconque.

La période de crise se fait sentir plus tardivement sur le continent qu’en Angleterre : il en est de