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l’ouvrier de fabrique, que le bâton du policier forçait à travailler à n’importe quelles conditions qu’il plaisait au manufacturier de lui imposer ; le compagnon ouvrier, que les lois corporatives privaient de toute possibilité d’acquérir quelque indépendance dans son métier ; le marchand, qui se heurtait à chaque pas à des réglementations absurdes ; le manufacturier, en conflit ininterrompu avec les corporations, qui veillaient d’une façon jalouse sur leurs privilèges ou bien avec les fonctionnaires, rapaces et indiscrets ; le maître d’école, le savant, le fonctionnaire qui, ayant reçu une meilleure éducation, luttaient en vain contre le clergé, ignorant et présomptueux, ou contre leurs supérieurs, stupides et despotiques. Bref, aucune classe n’était satisfaite : les petites concessions que le Gouvernement était obligé de faire de temps en temps ne l’étaient pas aux dépens du Gouvernement lui-même, car le trésor n’en avait pas les moyens, mais aux dépens de la haute aristocratie et du clergé ; quant aux grands banquiers et aux détenteurs des fonds, les derniers événements d’Italie, l’opposition croissante de la Diète hongroise, en même temps que l’esprit inaccoutumé de mécontentement et la demande de réformes qui se manifestaient dans tout l’Empire n’étaient pas pour fortifier leur foi en la solidité et en la solvabilité de l’Empire autrichien.

Ainsi l’Autriche, elle aussi, marchait, lentement, mais sûrement, vers un changement considérable.