Page:Marx - L’Allemagne en 1848.djvu/22

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une grande partie de ses anciens privilèges. Le système féodal de la tenure était presque partout prédominant. Les seigneurs fonciers avaient même conservé la juridiction sur leurs tenanciers. Privés de leurs privilèges politiques et du droit de contrôler les princes, ils avaient conservé, sur les paysans de leurs domaines, presque tout leur pouvoir souverain, datant du moyen âge, aussi bien que le privilège de l’exemption d’impôts. Le féodalisme était plus florissant dans certaines localités que dans d’autres ; mais nulle part, sauf sur la rive gauche du Rhin, il n’était entièrement détruit. Cette noblesse féodale, alors extrêmement nombreuse et en partie très riche, était considérée officiellement comme le premier « ordre » du pays. Elle fournissait les fonctionnaires supérieurs du gouvernement et presqu’exclusivement les officiers de l’armée.

En Allemagne, la bourgeoisie était loin d’être aussi riche et aussi concentrée qu’en France ou en Angleterre. Les anciennes manufactures allemandes qui avaient été détruites par l’introduction de la vapeur et l’extension rapide de l’industrie anglaise ; les ateliers modernes, introduits pendant le blocus continental de Napoléon et établis dans différentes régions du pays, ne compensaient pas la perte des anciens. Elles ne suffisaient pas à conférer à l’industrie une importance assez grande pour imposer ses besoins à l’attention du Gouvernement, jaloux de toute extension de la richesse et de la