Page:Marx - L’Allemagne en 1848.djvu/147

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avant que faisait l’ennemi, — ni, encore moins, attaqué — car elle ne s’est même pas défendue elle-même ; et lorsque le moment décisif arriva, lorsque Wrangel, à la tête de quarante mille hommes, frappa aux portes de Berlin, au lieu de trouver, comme il s’y attendait sûrement, lui et ses officiers, toutes les rues occupées par des barricades et toutes les fenêtres transformées en meurtrières, les portes étaient ouvertes et les rues occupées seulement par de paisibles bourgeois de Berlin se réjouissant du tour qu’ils avaient joué en se livrant, pieds et points liés, aux soldats étonnés. Il est vrai que, s’ils avaient résisté, l’Assemblée et le peuple auraient pu être battus, Berlin aurait pu être bombardé, et de nombreuses centaines d’hommes auraient pu être tués, sans empêcher pour cela la victoire finale du parti royaliste. Mais ce n’était pas une raison suffisante pour rendre aussitôt les armes. Une défaite bien disputée est un fait dont l’importance révolutionnaire est aussi grande que celle d’une victoire facilement gagnée. Les défaites de Paris en juin 1848 et de Vienne en octobre ont certainement plus fait pour révolutionner les esprits de la population de ces deux villes que les victoires de février et de mars. L’Assemblée et le peuple de Berlin auraient sans doute partagé le sort de ces deux villes ; mais ils seraient tombés glorieusement et auraient laissé après eux, dans l’esprit des survivants, un désir de revanche qui, aux époques révolutionnaires, est un des