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ESSAI SUR LA LANGUE DE LA FONTAINE

aurions voulu que, composant un vocabulaire spécial, il y recueillit ces jolis vers :

Elle eut regret d’être l’Hélène
D’un si grand nombre de Paris[1].

Plus d’une Hélène, au beau plumage,
Fut le prix du vainqueur…[2]

Philis, employé comme nom commun dans le sens de maîtresse, méritait aussi d’être remarqué :

Mari jaloux, non comme d’une femme,
Mais comme qui depuis peu jouiroit
D’une Philis[3]

Notre poète emploie souvent cette expression d’une manière fort comique :

La voilà donc compagne
De certaines Philis qui gardent les dindons,
Avec les gardeurs de cochons[4].

Dans la relation de voyage que La Fontaine adresse à sa femme, il lui dit : « Non loin de là nous aperçûmes quelques Phyllis, je veux dire Philis d’Égypte[5]. »

Quelques jours après, arrivé à Limoges, il s’exprime ainsi au sujet de cette ville et de celles qui l’habitent :

Ce n’est pas un plaisant séjour :
J’y trouve aux mystères d’Amour
Peu de savants, force profanes,
Peu de Philis, beaucoup de Jeannes[6].

Ce mot Jeannes sert ici à désigner les femmes du commun, comme le remarque fort bien M. Walckenaer. Quant aux Jeannetons, c’est tout autre chose. Après

  1. Liv. II, c. XIV, 611.
  2. Liv. VII, fab. xiii, 9.
  3. Liv. IV, c. XV, 28.
  4. (4)
  5. 5 septembre 1663, tome II, p. 643.
  6. 19 septembre, tome II, p. 670.