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écrite, mais encore dans l’architecture, dans la musique, dans la sculpture et la peinture. L’admirateur bien inspiré de Brunelleschi, de Palladio, de Cimarosa, de Raphaël, du Titien, se révèle dans ses vers, non moins que le fervent émule de Pindare et de Théocrite. Son génie n’aspirait qu’aux grandes choses ; aussi voulut-il vivre et mourir en Italie, au milieu des souvenirs d’un passé gigantesque, dans la majestueuse solitude de ces ruines, en face de ces vastes et mélancoliques horizons.

Cette élévation constante du génie de Platen devait nuire à sa popularité ; quelques grains de folle gaieté, quelques trivialités narquoises eussent mieux poussé sa réputation, surtout en France. Voyez l’exemple de Henri Heine. À côté de la muse de Platen, qu’on peut comparer à la Vénus de Milo, la muse de Heine n’apparaît à certains initiés que comme une grisette sentimentale et railleuse qui aurait lu avec profit Rabelais et Don Juan. C’est le jugement qu’en a porté Platen lui-même, et il lui appartenait mieux qu’à personne de le formuler. Platen et Heine différaient d’ailleurs si complètement par la nature de leur talent et de leur inspiration, qu’ils étaient antipathiques l’un à l’autre, et que des susceptibilités d’amour-propre les rendirent bientôt ennemis.

Mais je ne veux parler aujourd’hui que des épigrammes de Platen sur l’Italie. Est-il nécessaire de rappeler à cette occasion que le mot épigramme doit s’entendre ici dans le sens étymologique, en dehors de toute acception ou intention malicieuse ? Il s’agit de tout petits poëmes, composés, la plupart du temps, d’un ou de quelques distiques au plus, et où l’auteur