Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/98

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les villes conquises ; soldat, il lui fallait traîner un sabre inoffensif de garnison en garnison. Ce genre de vie molle et sans couleur avait fini par lui déplaire, et ce n’est pas la campagne d’Espagne, vainement travestie en guerre sérieuse par des bulletins sonores, qui changea ses idées.

Son régiment, le 27e de ligne, avait été désigné pour faire partie du Ier corps et de la 4e division sous les ordres du général vicomte Obert. Le 16 juillet 1823, il était devant Cadix où mon frère fit preuve d’entrain et de courage. Près du moulin d’Osio, il y avait une ferme isolée, occupée par les constitutionnels. Le colonel de dragons Rapatel, qui venait de lancer une partie de son régiment en tirailleurs qu’il appuyait de sa personne, passa sous les fenêtres de la ferme en question, et les Espagnols, au lieu de tirer sur lui et sa troupe, se bornèrent, on ne sait trop par quel caprice, à lui faire avec les mains un geste plus connu à la caserne qu’au couvent. Ce geste mit le colonel dans une rage folle. Rouge de colère, furieux, il allait lancer ses cavaliers contre les murs de la ferme, lorsque mon frère qui se trouvait près de là accourut avec une section de sa compagnie de grenadiers, fit enfoncer les portes par ses sapeurs, et les Espagnols, qui y étaient embusqués, furent tous tués ou faits prisonniers. Je laisse à penser combien il fut remercié par le colonel tout à fait calmé.

À quinze ou vingt ans de là, Achille rencontra aux eaux de Plombières le baron Rapatel, alors général