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aventureuses. Ce M. Fontanier qui, à un assent de terroir des plus prononcés, joignait une figure de blaireau guettant sa pâture, avait été, de la part de Conscience, l’objet d’une charge fort bouffonne. Le malin élève qui, de mémoire, reproduisait cette charge avec une facilité inouïe, la dessinait partout, tantôt au crayon noir, tantôt au crayon blanc, tantôt au crayon rouge, selon la couleur du fond qu’il rencontrait ; on voyait notre professeur dans toutes les rues, sur les portes des commodités, sur celles des maisons closes et jusque sur celles de la ville !

Le père Fontanier se plaignit souvent, en classe, de cet abus du talent du peintre imberbe qui répondait toujours : « M’sieu, ça n’est pas moi ! » jusqu’au jour où il fut pris par sa victime au moment où il crayonnait l’éternelle charge sur une des portes de l’hôtel de ville. Pour se venger, Conscience dessina M. Fontanier, dansant comme un perdu, la toque sur l’oreille, les plis de sa robe abandonnés au vent, en face d’un essaim de jeunes personnes aux costumes des moins décents. Ces figurines, d’un pied de hauteur, furent découpées et suspendues à de longs fils qu’on accrocha à la voûte de notre salle d’étude. M. Fontanier faillit en avoir une attaque.

Un autre jour, c’était un dimanche, Conscience, au lieu d’aller en promenade avec ses camarades, se faufila dans la classe, planta des petits clous en ligne dans l’épaisseur de la planche sur laquelle nos pieds reposaient et enlaça à ces clous une corde de piano