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de Dole, le général Bachelu, et enfin l’imprimeur Joly père, qui m’a souvent raconté les visites que lui fit Bonaparte, alors qu’il venait chaque jour à pied depuis Auxonne, pour corriger les épreuves de sa fameuse lettre à M. de Buttafuoco. Le futur empereur conserva longtemps l’éloquence verbeuse et emphatique de l’école, qu’il perdit peu à peu, et ses premières lettres n’en sont pas exemptes, malgré l’élégance et la vigueur du style. Je possède un autographe qui en est la preuve ; c’est une lettre que Bonaparte adressait de Valence le 27 juillet 1792 à M. Naudin, capitaine d’artillerie, qu’il avait connu à Auxonne et qu’il nomma plus tard intendant-général des Invalides. C’est M. Titon de Raze, héritier de M. Naudin, qui m’a fait don, en 1835, de cet intéressant document, que voici :


« Monsieur,

« Tranquille sur le sort de mon pays et la gloire de mon ami, je n’ai plus de sollicitude que pour la mère patrie ; c’est à en conférer avec vous que je vais employer les moments qui me restent de la journée. S’endormir la cervelle pleine de la grande chose publique, et le cœur ému des personnes que l’on estime et que l’on a un regret sincère d’avoir quittées, c’est une volupté que les grands épicuriens seuls connaissent.

« Aura-t-on la guerre ?… se demande-t-on depuis plusieurs mois. J’ai toujours été pour la négative. Jugez mes raisons.