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Weiss[1], avait voué à ce géant tombé un attachement sans réserve, attachement fait d’admiration pour son œuvre magnifique et de pitié pour sa triste situation. De l’Olympe où il plana, Rouget de Lisle termina sa vie dans la misère ; pendant quarante ans il gravit un calvaire au sommet duquel l’attendait la mort. Seul, le gouvernement de Louis-Philippe, grâce aux sollicitations réitérées de Béranger, adoucit ses derniers jours[2]. Ce sera une honte éternelle pour les contemporains d’avoir laissé souffrir de la pauvreté le génie qui a doté la France du chant national le plus grandiose de tous les temps ; du chant qui avait sauvé la patrie à Jemmapes et aurait pu encore la sauver à Waterloo.

À cause de sa susceptibilité, il était fort difficile de venir en aide à Rouget de Lisle. La publication de ses Chants français, qui parurent en 1824, nous permit à peine un témoignage prévenant[3], bien que mon frère

  1. Weiss (Pierre-Charles), né le 15 janvier 1779 à Besançon, mort dans cette ville le 11 février 1866. Poète, littérateur et historien, il a attaché son nom à la grande entreprise biographique des frères Michaud. C’était un homme d’esprit fort érudit. Il eut pour camarades Charles Nodier, Abel de Rémusat, Martin de Gray, etc., et mourut comme bibliothécaire de Besançon.
  2. Le 5 août 1830, le duc d’Orléans lui accorda une pension de 1, 600 fr. qui fut portée à 3, 500 fr. deux ans plus tard. Sur la demande du général Blein, son ami, Rouget de Lisle fut décoré le 6 décembre 1830.
  3. « … Le recueil tire à sa fin, grâce à vous, à M. Marquiset et à Béranger. » (Lettre de Rouget de Lisle à Charles Weiss, 13 septembre 1823.)
    « … Conjurez M. Marquiset de nous seconder dans cette bonne œuvre (propagation du recueil). » (Lettre du même au même, 11 juillet 1824.)