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il était plus répandu que moi dans les salons du quartier Saint-Louis, qui est le faubourg Saint-Germain de Versailles. Moi, j’avais une préférence marquée pour les salons du quartier Notre-Dame, dont le public était plus en harmonie avec mes opinions et mes goûts. Quelle que fut l’heure à laquelle nous rentrions, celui qui revenait le dernier entrait dans la chambre de l’autre et on se redisait les historiettes et les émotions de la soirée. Mais Fleury, pour la première fois, n’avait pas plus que moi résisté aux regards de Mme de Laporte ; il en était devenu fort épris, et remarquant que nous courions le même lièvre, il ne me dit rien de ses projets ; je ne lui parlai pas davantage des miens. Comme il savait le départ de Mme de Laporte, il se rendit aussi à la gondole, mais en évitant de me rencontrer, afin de se soustraire à toute question de ma part. Il avait pris une place dans la rotonde et s’était traîtreusement blotti dans une allée voisine, d’où il ne sortit qu’au moment du départ de la voiture.

Nous voilà donc tous trois en route vers Paris, livrés chacun à nos rêves amoureux, à nos espérances toutes roses.

Arrivés devant le bureau des gondoles, situé à cette époque où il est encore aujourd’hui, rue de Rivoli, en face même du guichet qui débouche sur la place du Carrousel, nous nous élançâmes au même moment, Fleury, de la rotonde, moi, du coupé, pour offrir le bras à Mme de Laporte. À peine avions-nous fait notre conversion mutuelle vers le centre, que nous aperçû-