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guer de son poids sa tête et son cou merveilleusement attachés ; pleine d’une grande bienveillance, et n’ouvrant jamais la bouche que pour en laisser tomber de douces, d’agréables paroles.

Mme  la duchesse de Castiglione est bonne musicienne ; sa voix étendue et vibrante plonge ceux qui

l’entendent dans de ravissantes extases ; elle dit délicieusement surtout, et avec un cachet particulier, les romances guerrières de l’empire : La sentinelle !Quoi ! vous partez pour aller à la gloire !Partant pour la Syrie, etc., etc. Ces romances, presque séditieuses alors, remplissaient nos jeunes cerveaux pendant des semaines entières, et nous les fredonnions constamment en pensant à celle qui nous les avait chantées avec tant de mélancolie, de sentiment et de goût. La voix de la duchesse est belle comme elle, si l’on peut s’exprimer ainsi, et, lorsqu’elle chante, cette voix semble naître dans son cœur et venir mourir dans le vôtre.

Les détails du mariage de Mme  la duchesse de Castiglione sont assez curieux pour être ici rapportés. Ennuyé d’un long veuvage, le maréchal Augereau, dont le nom se rattache à tous les beaux faits d’armes de nos armées, alla trouver un beau matin M. Péan de Saint-Gilles, son ami bien plus que son notaire, et lui tint à peu près ce langage : « Je m’ennuie d’être seul ; le rôle de femme de ménage m’est insupportable, et je ne me sens pas la force de le continuer plus longtemps, je voudrais me remarier, et comme,