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LA RÉVOLUTION RUSSE

hasardai au dehors. Les abords immédiats de l’hôtel me parurent libres. Je gagnai les quais. J’y étais seul. Une fusillade, venue de loin, les prenait par moments en enfilade. Je marchais en rasant les murs. Tout à coup, une femme et un enfant débouchent d’une rue. Ils n’avaient pas fait trois pas sur le quai qu’un coup de feu les abattit. L’enfant tomba, les bras écartés comme un oiseau qui choit, les ailes ouvertes.

« Sur la rive droite de la Néva, une foule énorme grouillait autour de la forteresse que les révolutionnaires assiégeaient et jusque sur la glace du fleuve où l’on avait amené les canons. Je devais traverser les ponts pour rentrer chez moi. Je m’y dirigeai sous les balles. Par miracle, aucune ne m’atteignit. J’arrivai à mon domicile vers deux heures du matin. Soixante-treize officiers avaient été tués à Pétrograd ce jour-là. »


C’est le lendemain, 28 février, à huit heures, que l’hôtel Astoria fut attaqué… et pris. Qu’on imagine ce réveil épouvanté après une nuit d’angoisse ! Le malheureux général de cavalerie qui avait ordonné la résistance fut tué à