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d’abord consultée sur ce mariage ; je n’y ai pensé que par zèle pour vous, et vous m’en avez paru satisfaite.

Angélique.

Oui, monsieur, votre zèle est admirable ; c’est la plus belle chose du monde. J’ai tort, je suis une étourdie ; mais laissez-moi dire. À cette heure que ma mère n’y est plus, et que je suis un peu plus hardie, il est juste que je parle à mon tour, et je commence par vous, Lisette ; c’est que je vous prie de vous taire, entendez-vous ? Il n’y a rien ici qui vous regarde : quand il vous viendra un mari, vous en ferez ce qu’il vous plaira, sans que je vous en demande compte ; et je ne vous dirai point sottement, ni que vous êtes née coiffée, ni que vous êtes trop heureuse, ni que vous attendez un prince, ni d’autres propos aussi ridicules que vous m’avez tenus, sans savoir ni quoi, ni qu’est-ce.

Frontin.

Sur sa part, je devine la mienne.

Angélique.

La vôtre est toute prête, monsieur. Vous êtes honnête homme, n’est-ce pas ?

Frontin.

C’est en quoi je brille.

Angélique.

Vous ne voudrez pas causer du chagrin à une fille qui ne vous a jamais fait de mal ? Cela serait cruel et barbare.