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Dorante.

Ce n’était pas mon dessein.

Lisette.

Cela ne se fait pas, vous dis-je. Que diantre voulez-vous qu’on fasse de vous ? Vraiment Angélique vous épouserait volontiers ; mais nous avons une mère qui ne sera pas tentée de votre légitime, et votre amour ne nous donnerait que du chagrin.

Dorante.

Eh ! Lisette, laisse aller les choses, je t’en conjure ; il peut arriver tant d’accidents ! Si je l’épouse, je te jure d’honneur que je te ferai ta fortune. Tu n’en peux espérer autant de personne, et je tiendrai parole.

Lisette.

Ma fortune !

Dorante.

Oui, je te le promets. Ce n’est pas le bien d’Angélique qui me fait envie. Si je ne l’avais pas rencontrée ici, j’allais, à mon retour à Paris, épouser une veuve très riche et peut-être plus riche qu’elle ; tout le monde le sait ; mais il n’y a plus moyen : j’aime Angélique, et si jamais tes soins m’unissaient à elle, je me charge de ton établissement.

Lisette, rêvant un peu.

Vous êtes séduisant. Voilà une façon d’aimer qui commence à m’intéresser ; je me persuade qu’Angélique serait bien avec vous.

Dorante.

Je n’aimerai jamais qu’elle.