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amoureux ; qu’il soupire pour vous ; que vous êtes l’objet secret de sa tendresse.

Monsieur Remy.

Dorante ?

Araminte, riant.

L’objet secret de sa tendresse ! Oh ! oui, très secret, je pense. Ah ! ah ! je ne me croyais pas si dangereuse à voir. Mais dès que vous devinez de pareils secrets, que ne devinez-vous que tous mes gens sont comme lui ? Peut-être qu’ils m’aiment aussi ; que sait-on ? Monsieur Remy, vous qui me voyez assez souvent, j’ai envie de deviner que vous m’aimez aussi.

Monsieur Remy.

Ma foi, madame, à l’âge de mon neveu, je ne m’en tirerais pas mieux qu’on dit qu’il s’en tire.

Madame Argante.

Ceci n’est pas matière à plaisanterie, ma fille. Il n’est pas question de votre monsieur Remy ; laissons là ce bonhomme, et traitons la chose un peu plus sérieusement. Vos gens ne vous font pas peindre ; vos gens ne se mettent point à contempler vos portraits ; vos gens n’ont point l’air galant, la mine doucereuse.

Monsieur Remy, à Araminte.

J’ai laissé passer le bonhomme à cause de vous, au moins ; mais le bonhomme est quelquefois brutal.

Araminte.

En vérité, ma mère, vous seriez la première à vous moquer de moi, si ce que vous dites me