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ment, il ne vous dira mot ; jamais vous n’entendrez parler de son amour.

Araminte.

En es-tu bien sûr ?

Dubois.

Oh ! il ne faut pas en avoir peur ; il mourrait plutôt. Il a un respect, une adoration, une humilité pour vous, qui n’est pas concevable. Est-ce que vous croyez qu’il songe à être aimé ? Nullement. Il dit que dans l’univers il n’y a personne qui le mérite ; il ne veut que vous voir, vous considérer, regarder vos yeux, vos grâces, votre belle taille ; et puis c’est tout. Il me l’a dit mille fois.

Araminte, haussant les épaules.

Voilà qui est bien digne de compassion ! Allons, je patienterai quelques jours, en attendant que j’en aie un autre. Au surplus, ne crains rien ; je suis contente de toi. Je récompenserai ton zèle et je ne veux pas que tu me quittes, entends-tu, Dubois ?

Dubois.

Madame, je vous suis dévoué pour la vie.

Araminte.

J’aurai soin de toi. Surtout qu’il ne sache pas que je suis instruite ; garde un profond secret ; et que tout le monde, jusqu’à Marton, ignore ce que tu m’as dit. Ce sont de ces choses qui ne doivent jamais percer.

Dubois.

Je n’en ai jamais parlé qu’à madame.

Araminte.

Le voici qui revient ; va-t’en.