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LE CHEVALIER

Ce que j’en dis ? rien ; je crois que je rêve, et je tâche de me réveiller.

LÉLIO

Me voilà en belle posture, avec sa main qu’elle m’offre, que je lui demande avec fracas, et dont je ne me soucie point. Mais ne me trompez-vous point ?

LE CHEVALIER

Ah, que dites-vous là ! je vous sers loyalement, ou je ne suis pas soubrette. Ce que nous voyons là peut venir d’une chose : pendant que nous nous parlions, elle me soupçonnait d’avoir quelque inclination à Paris ; je me suis contenté de lui répondre galamment là-dessus ; elle a tout d’un coup pris son sérieux ; vous êtes entré sur le champ ; et ce qu’elle en fait n’est sans doute qu’un reste de dépit, qui va se passer ; car elle m’aime.

LÉLIO

Me voilà fort embarrassé.

LE CHEVALIER

Si elle continue à vous offrir sa main, tout le remède que j’y trouve, c’est de lui dire que vous l’épouserez, quoique vous ne l’aimiez plus. Tournez-lui cette impertinence-là d’une manière polie ; ajoutez que, si elle ne veut pas le dédit sera son affaire.

LÉLIO

Il y a bien du bizarre dans ce que tu me proposes là.

LE CHEVALIER

Du bizarre ! Depuis quand êtes-vous si délicat ?