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que j’allais embrasser ; de sorte que j’avais le plaisir de penser, en m’enivrant, que c’était la raison qui me versait à boire. Quel nectar ! Ensuite, un beau matin, je me trouvai sans un sol. Comme j’avais besoin d’un prompt secours, et qu’il n’y avait point de temps à perdre, un de mes amis que je rencontrai me proposa de me mener chez un honnête particulier qui était marié, et qui passait sa vie à étudier des langues mortes ; cela me convenait assez, car j’ai de l’étude : je restai donc chez lui. Là, je n’entendis parler que de sciences, et je remarquai que mon maître était épris de passion pour certains quidams, qu’il appelait des anciens, et qu’il avait une souveraine antipathie pour d’autres, qu’il appelait des modernes ; je me fis expliquer tout cela.

FRONTIN

Et qu’est-ce que c’est que les anciens et les modernes ?

TRIVELIN

Des anciens…, attends, il y en a un dont je sais le nom, et qui est le capitaine de la bande ; c’est comme qui te dirait un Homère. Connais-tu cela ?

FRONTIN

Non.

TRIVELIN

C’est dommage ; car c’était un homme qui parlait bien grec.

FRONTIN

Il n’était donc pas français cet homme-là ?