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JUGEMENT

fins et ne point éveiller les soupçons de Lélio, de n’y paraître que déguisée en homme. C’est sur ce travestissement que roule toute l’intrigue. Un seul domestique est dans son secret. Grâce à l’imprudence de Frontin, ce secret cesse d’en être un pour les domestiques du château. Le faux chevalier, ne pouvant plus faire mystère de son état, cherche au moins à détourner les conséquences de sa mascarade, en se donnant pour sa propre femme de chambre. Elle est supposée avoir été déléguée pour voir ce qui se 1 passe dans le château, et pour en faire son rapport à sa prétendue maîtresse.

La comtesse, qui ne se doute de rien, devient amoureuse de sa cousine ; de leur côté, Trivelin et Arlequin, qui se croient au fait, se permettent avec le chevalier les familiarités d’usage entre gens de même condition ; tandis que Lélio est amené à confier au chevalier, qu’il prend également pour une soubrette, le dégoût que lui inspire la comtesse, et la préférence intéressée qu’il accorde à la veuve de Paris, dont la fortune surpasse de beaucoup celle de sa maîtresse campagnarde. Pour servir ce nouvel amour de Lélio, la fausse suivante se fait remettre le dédit dont il est possesseur. C’est ainsi que le fourbe se démasque et qu’il est puni : il perd femme et argent. Les comédies se terminent d’ordinaire par un mariage ; ici le dénouement consiste en ce que personne ne se marie.

Des plaisanteries fort libres, qui naissent du travestissement de la jeune veuve, plaisanteries dont Montfleury avait fourni le premier exemple dans la Femme juge et partie, et que Patrat a ressuscitées dans l’Heureuse Erreur, font