Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 3.djvu/342

Cette page n’a pas encore été corrigée

LÉLIO

Vous me haïssez, vous dis-je, je le sais, et ne vous en veux aucun mal ; il n’y a que l’artifice dont vous vous servez que je condamne.

FRÉDÉRIC

Je vois bien que quelqu’un de mes ennemis vous aura indisposé contre moi.

LÉLIO

C’est de la Princesse elle-même que je tiens ce que je vous dis ; et quoiqu’elle ne m’en ait fait aucun mystère, vous ne le sauriez pas sans vos compliments. J’ignore si vous avez craint la confiance dont elle m’honore ; mais depuis que je suis ici, vous n’avez rien oublié pour lui donner de moi des idées désavantageuses, et vous tremblez tous les jours, dites-vous, que je ne sois un espion gagé de quelque puissance, ou quelque aventurier qui s’enfuira au premier jour avec de grandes sommes, si on le met en état d’en prendre. Oh ! si vous appelez cela de l’amitié, vous en avez beaucoup pour moi ; mais vous aurez de la peine à faire passer votre définition.

FRÉDÉRIC

, d’un ton sérieux.

Puisque vous êtes si bien instruit, je vous avouerai franchement que mon zèle pour l’État m’a fait tenir ces discours-là, et que je craignais qu’on ne se repentît de vous avancer trop ; je vous ai cru suspect et dangereux ; voilà la vérité.

LÉLIO