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LUCIDOR

Trouvez-vous qu’ils ont tort ?

FÉLICIE

Un très grand tort.

LUCIDOR


M’en croirez-vous ? prévenons celui que nos parents pourraient avoir avec nous. Les miens me chérissent, et seront bientôt apaisés : assurons-nous d’une union éternelle autant que légitime ; on peut nous marier ici, et quand nous serons époux, il faudra bien qu’ils y consentent.

FÉLICIE

Ah ! vous me faites frémir, et par bonheur ma compagne n’est qu’à deux pas d’ici.

LUCIDOR

Quoi ! vous frémissez de songer que je serais votre époux ?

FÉLICIE

Mon époux, Lucidor ! Voulez-vous que mon cœur soit la dupe de ce mot-là ! Vous devriez craindre vous-même de me persuader. N’est-il pas de votre intérêt que je sois estimable ? et l’estime que je mérite encore, que deviendrait-elle ? Vous permettre de m’aimer, vous l’entendre dire, vous aimer moi-même, à la bonne heure, passe pour cela ; s’il y entre de la faiblesse, elle est excusable ; on peut être tendre et pourtant vertueuse ; mais vous me proposez d’être insensée, d’être extravagante, d’être méprisable ; oh ! je suis fâchée contre vous ; je ne vous reconnais point à ce trait-là.