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comme vous ; mais comme Hortense est aimable et qu’il s’agit de l’épouser, nous trouvons cette peur-là si burlesque ! si bouffonne ! qu’il n’y a point de comédie qui nous divertisse tant ; car il est sûr que vous auriez plu à Hortense si vous ne l’aviez pas fait rire : mais ce qui fait rire n’attendrit plus, et je vous dis cela pour vous divertir vous-même.

ROSIMOND

C’est aussi tout l’usage que j’en fais.

MARTON

Vous avez raison, Monsieur, je suis votre servante. (Elle revient.) Seriez-vous encore curieux d’une de nos folies ? Dès que Dorante et Dorimène sont arrivés ici, vous avez dit qu’il fallait que Dorante aimât ma maîtresse, pendant que vous feriez l’amour à Dorimène, et cela à la veille d’épouser Hortense ; Monsieur, nous en avons pensé mourir de rire, ma maîtresse et moi ! Je lui ai pourtant dit qu’il fallait bien que vos airs fussent dans les règles du bon savoir-vivre. Rien ne l’a persuadée ; les gens de ce pays-ci ne sentent point le mérite de ces manières-là ; c’est autant de perdu. Mais je m’amuse trop. Ne dites mot, je vous prie.

ROSIMOND

Eh bien, Marton, il faudra se corriger : j’ai vu quelques benêts de la province, et je les copierai.

MARTON

Oh ! Monsieur, n’en prenez pas la peine ; ce ne serait pas en contrefaisant le benêt que vous feriez revenir les bonnes dispositions où ma maîtresse était