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CUPIDON

De la dignité dans l’amour ! de la décence pour la durée du monde ! voilà des agréments d’une grande ressource ! Il ne sait plus ce qu’il dit. Minerve, toute la nature est intéressée à ce que vous renvoyiez ce vieux garçon-là. Il va l’appauvrir à un point qu’il n’y aura plus que des déserts. Vivra-t-elle de soupirs ? Il n’a que cela vaillant. Autant en emporte le vent : et rien ne reste que des romans de douze tomes. Encore, à la fin, n’y aura-t-il personne pour les lire. Prenez garde à ce que vous allez faire.

L’AMOUR

Juste ciel ! faut-il… ?

CUPIDON

Bon ! des apostrophes au ciel ! voilà encore de son jargon. Eh ! morbleu ! qu’il s’en aille. Tenez, mon ami, je veux bien encore vous parler raison. Vous me reprochez ma naissance, parce qu’elle n’est pas méthodique, et qu’il y manque une petite formalité, n’est-ce pas ? Eh bien ! mon enfant, c’est en quoi elle est excellente, admirable ; et vous n’y entendez rien.

MERCURE

Ceci est nouveau.

CUPIDON

Doucement. La nature avait besoin d’un Amour, n’est-il pas vrai ? Comment fallait-il qu’il fût, à votre avis ? Un conteur de fades sornettes ? Un trembleur qui a toujours peur d’offenser, qui n’eût fait dire aux femmes que ma gloire ! et aux hommes que vos divins appas ? Non, cela ne valait rien. C’était un espiègle