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semble qu’en effet je dis des choses extraordinaires ; je crois que je viens de chanter. Remettez moi, mon père ; où en étions-nous ? Je me retrouve : vous m’avez proposé, il y a quelques jours, un mariage qui m’a bouleversé la tête à force d’y penser : tout rompu qu’il est, je n’en saurais revenir, et il faut que j’en pleure.

MONSIEUR ARGANTE

Oh ! oh ! cela serait-il de bonne foi, ma fille ? D’où vient tant de répugnance pour un mariage qui t’est avantageux ?

MADEMOISELLE ARGANTE

Eh ! me le proposeriez-vous s’il n’était pas avantageux ?

MONSIEUR ARGANTE

Je fais le tout pour ton bien.

MADEMOISELLE ARGANTE

, pleurant.

Et cependant je vous paie d’ingratitude.

MONSIEUR ARGANTE

Va, je te le pardonne ; c’est un petit travers qui t’a pris.

MADEMOISELLE ARGANTE

Continuez, allez votre train, mon père ; continuez, n’écoutez pas mes dégoûts, tenez ferme, point de quartier, courage ; dites : je veux ; grondez ; menacez, punissez ne m’abandonnez pas dans l’état où je suis : je vous charge de tout ce qui m’arrivera.

MONSIEUR ARGANTE

, attendri.

Va, mon enfant, je suis content de tes dispositions, et tu peux t’en fier à moi ; je te donne à un