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LA VILLE CHARNELLE


le soleil moraliste

Mes biens chers spectateurs, votre imbécillité
devenue légendaire, me force d’inonder
vos yeux niais, vos bouches bées et vos cœurs froids
par un torrent de vérité resplendissante
qui vous éclairera sur les héros bizarres
et sur le dénouement de ce grand drame hilare.

Les vignes folles furent dûment empoignées avec rage
par leurs amants brutaux, les Vendangeurs,
puis giflées comme on gifle en plein visage
les femmes qui ne savent rougir différemment.
Ce n’est qu’en piétinant le corps de sa maîtresse,
que l’on peut en tirer l’amour divinisant !…
Les beaux Vendangeurs enfoncèrent leurs pieds
dans les mamelles de raisin, pour qu’un sang noir
pût ruisseler de joie dans leurs verres brandis
très haut, le soir, au fond des bouges,