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LA MORT TIENT LE VOLANT

elle se penchait sur son gouvernail en forme de boussole, en tenant tête aux flèches et aux griffes de la pluie.

Et son bateau tanguait de ci de là sur sa proue à ressorts, parmi la vague furibonde de sa vitesse, en écartant sur ses flancs les draperies ténébreuses d’un sillage boueux.

Ce fut le Jaguar métallique qui la vit le premier : il renâcla et rugit aussitôt, en balançant son brûlant radiateur sur les suspensions élastiques de ses pattes fourrées.

Puis il s’élança, à grands coups de reins, aux trousses de la Mort, portant son nègre en équilibre sur le panache raidi de sa queue.

Et le nègre criait :

— Ô grand Jaguar d’airain, avale donc la route immense, et mords le vent aux fesses !…

L’un des énormes revolvers aux tambours explosifs bondissait derrière lui, criblant l’horizon vaste de ses éclats de vitesse. Et son mécanicien criait :