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À HENRI DE RÉGNIER

Ô rameur nonchalant dont la voix nostalgique
cadence les saccades de l’aviron sonore
et le mol froissement velouté de la pale,
tu lanças dans le fleuve idéal de ta vie
une barque assouplie par les doigts des Nayades,
dont la voile est tissée d’azur mythologique
et la quille lestée de pierres sidérales !…

Tes deux rames taillées dans la chair de l’érable,
ont pleuré sur le sable tout leur sang monotone,
tels les bras écorchés des Dryades plaintives
qui s’abandonnent mollement à la dérive…

Et tu passais ramant à tour de bras, farouche,