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LA VILLE CHARNELLE

leurs falbalas d’algues somnolentes,
avec des longs glouglous loquaces de goulot.
Elles sont devenues les gardiennes du port,
les mornes Forteresses,
avec sur la poitrine ridée par les batailles,
des étoiles-de-mer en guise de médailles.

Tout à coup elles se sentent frôler
par des mains innombrables et ce sont
leurs enfants, les tout jeunes Navires,
qui les embrassent violemment et les caressent,
et dont les mâts, les drisses et les cordages
leur font un lierre terrifiant d’allégresse.

Les Forteresses sourient frileusement
ouvrant leurs bouches lasses aux rares dents jaunies…
Ce sont de vieux balcons aux balustres que casse
le Vent, à coups de poings, ivrogne millénaire !…