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LAI D’YWENEC.

des motifs de ma démarche. Je suis venu en ces lieux pour solliciter la faveur d’être votre ami ; depuis long-temps je vous aime et mon cœur vous desire. Je n’ai jamais aimé et n’aimerai jamais d’autre femme que vous ; et je vous l’avouerai, je ne serois point venu en ces lieux, je ne serois pas même sorti de mon pays, si vous ne m’aviez, vous même, fait le plaisir de me demander pour être votre amant. La dame qui avoit repris courage découvrit sa figure, et répondit au chevalier. Seigneur, je consens à vous accepter pour être mon ami ; mais au préalable je veux être certaine que vous croyez en Dieu. Le chevalier avoit tout ce qu’il falloit pour captiver une femme ; il étoit dans la fleur de l’âge, beau et bien fait. Dame, vous avez parfaitement raison, je ne voudrois pour nulle chose au monde que vous ayez quelque soupçon sur ma foi. Je crois fermement au créateur qui mourut pour nous racheter du péché de notre père Adam, causé par le manger d’une pomme bien amère. Il a été, il est, il sera éternellement la vie et le refuge des pécheurs. Au surplus,