Page:Marie de France - Poésies, éd. Roquefort, I, 1820.djvu/245

Cette page a été validée par deux contributeurs.
229
LAI DE LANVAL.

trage qu’elle dit avoir reçu de Lanval. Il a osé me requérir d’amour, et d’après mon refus, il m’a injuriée et avilie. Il a osé se vanter d’avoir une amie d’une beauté incomparable, dont la dernière des suivantes valoit mieux que moi. Le roi enflammé de colère fit serment que si le coupable ne se justifioit pas à l’assemblée des barons, il le feroit pendre ou brûler.

En sortant de chez la reine, Arthur ordonna à trois barons de se rendre chez Lanval, qui étoit bien triste et bien chagrin. En rentrant chez lui il s’était aperçu qu’il avoit perdu son amie pour avoir découvert son amour. Seul et renfermé dans son appartement, il songeoit à son malheur. Un moment il appeloit son amie qui ne venoit point, puis il se mettoit à soupirer et à pleurer ; souvent même il perdit l’usage de ses sens. C’est en vain qu’il demandoit pardon et crioit merci, sa belle refusa toujours de se montrer. Il maudissoit sa tête et sa bouche ; son chagrin étoit si violent, qu’on doit regarder comme une merveille