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LAI DE LANVAL.

fut servi. Quoique le repas fût assaisonné d’appétit et de bonne chère, Lanval avoit un mêts à lui seul qui lui plaisoit beaucoup. C’étoit d’embrasser son amie et de la serrer dans ses bras.

En sortant de table on lui amène son cheval qui étoit tout apprêté, et après avoir fait ses adieux, il part pour retourner à la ville, mais tellement étonné de son aventure qu’il ne peut encore y croire, et qu’il regarde de temps en temps en arrière, comme pour se convaincre qu’il n’a pas été abusé par une illusion flatteuse.

Il rentre à son hôtel et trouve tous ses gens parfaitement bien vêtus. Il fait grande dépense sans savoir d’où l’argent lui vient. Tout chevalier qui avoit besoin de séjourner à Carduel pouvoit venir s’établir chez Lanval qui se faisoit un devoir de le traiter parfaitement. Outre les riches présents qu’il faisoit, Lanval rachetoit les prisonniers, vêtissoit les ménétriers[1], il n’eut pas un seul

  1. Sous ce nom étoient compris les jongleurs, les conteurs et les trouverres, troupe extrêmement famé-