Page:Marie de Compiègne - L’évangile aux femmes.djvu/29

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 25 —

procédé qui rappelle ces vers de l’aimable poète des Bucoliques :

Ante leves ergo pascentur in œthere cervi,
Et freta destituent nudos in littore pisces
, etc.

C’est une satire contre les femmes, satire violente et injuste le plus souvent, mais quelquefois aussi à peu près sincère, et toujours piquante. Le moyen-âge qui avait entouré la femme d’un si grand prestige, en lui donnant une place d’honneur dans les institutions féodales, ne fermait pas cependant les yeux sur ses défauts, et passant d’un extrême à l’autre, dépassait alors le but. À côté des saluts d’amour et des éloges intéressés des poètes errants, on rencontre la raillerie amère et le coup d’aiguillon méchant du moine ou du clerc, qui se venge sur les femmes de la contrainte et des ennuis du cloître.

Je me range volontiers sur ce point à l’explication donnée par M. Gaston Paris dans le discours d’ouverture de son cours de 1875 au Collège de France. Après avoir montré comment s’est formée cette littérature de fableaux, source première de la comédie et du roman moderne, que l’Orient nous a transmise par ses contes, il se demande d’où vient cet acharnement contre le sexe faible que montrent les poètes et les moralistes du moyen-âge il cherche à expliquer le contraste entre l’idée que nous donnent de la femme les poètes de l’épopée et du roman chevaleresque, et celle que nous en aurions, si nous nous en rapportions aux auteurs de fableaux. Les contes innombrables et presque toujours plaisants que nous possédons proviennent de l’Inde, et ils ont leur raison d’être dans le milieu qui les a produits. Le renoncement au monde commandé par la religion boudhique devait inspirer aux brahmanes des critiques amères contre la femme, qui pouvait les détourner de leur voie. De même, au moyen-âge, les clercs, qui se trouvaient à peu près dans les mêmes conditions, appliquèrent à la femme, dans leurs imitations des contes indiens, les mêmes idées que les