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les forçats du mariage

un Rabourdet ! Je ne suis donc plus bon qu’à jeter aux loups. J’ai mal géré la fortune. Il est vrai que je l’ai plus digérée que gérée. On me reproche le crime de Bassou, le procès qui s’en est suivi. Tout cela ne m’est pas dit en face ; ils savent bien que je ne le supporterais pas. Mais ce sont des allusions indirectes, des regards haineux, des inflexions de voix acides, enfin tout un arsenal de petites épingles et d’aiguilles crochues, auprès desquelles un bon coup de poignard en pleine poitrine serait un bienfait.

— Comment, ce sublime Démosthènes, aux airs olympiens, posant pour les belles manières et les grands sentiments…

— Est devenu méchant comme un mauvais roquet. Sa nature primitive, sa vraie nature de cuistre a reparu. Physiquement même, tu ne le reconnaîtrais pas. Ce n’est plus ce bel homme entre deux âges, pomponné, sanglé, toujours la bouche en cœur, portant beau, la figure rebondie. Hélas ! son menton rejoint mélancoliquement sa poitrine ; ses joues pendent ; son ventre ballotte ; son œil, autrefois émerillonné, est terne, abattu ; sa bouche, triste ; ses cheveux sont presque blancs. Si sa mauvaise humeur ne se tournait pas tout entière contre moi, je le plaindrais presque.

— Et ta femme, de quel côté se range-t-elle ?

— Pauvre femme ! elle voudrait protester, me défendre ; hélas ! ma cause est si mauvaise ! Elle ne