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les forçats du mariage

— C’est parce que je t’aime, au contraire, plus que moi-même, plus que ma passion, que je raisonne ainsi.

— Non, non, ce n’est pas là le langage de la passion. Quand on aime, on ne raisonne pas. Est-ce que je raisonne, moi ? Pour vous, j’ai tout sacrifié, je sacrifierais tout encore. Veux-tu partir avec moi, dis ?

— Voyons, ma chère, calme-toi, reprit Robert qui s’assit à côté d’elle, et l’entoura doucement de son bras. Je t’aime de toute mon âme ; mais je ne puis pas plus quitter Marcelle que tu ne peux quitter Étienne, ces deux êtres si bons, si affectueux, qui nous aiment si tendrement.

— Restez donc avec votre femme, s’écria-t-elle, hors d’elle-même.

Elle se dirigea vers la porte.

Robert la retint.

— Tu ne sortiras pas dans cet état. Je n’aime pas Marcelle comme je t’aime, tu le sais bien.

— Vous l’aimez mieux. Ce n’est pas elle que vous consentiriez à quitter même pendant six mois ; tandis que moi, je quitterais Étienne pour la vie. Robert, Robert, ne m’abandonne pas. C’est ma grande passion pour toi qui m’excuse, qui me réhabilite à mes propres yeux, c’est cette passion seule qui me fait vivre.

Mais Robert restait froid. Il essaya encore de l’apaiser.