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les forçats du mariage

le bonheur facile, il était à la fois incapable de se soumettre au devoir et incapable de réagir contre une souffrance si vive. Il s’y abandonna avec des faiblesses d’enfant gâté.

À bout de courage, il pensa à Pierre Fromont. Il laissa à son valet de chambre le soin de ses préparatifs de départ, et se fit conduire chez son ami. Lui seul comprendrait sa situation d’esprit, saurait le consoler ; ou du moins cette confidence le soulagerait.


XV


Pierre Fromont demeurait rue Madame. C’était un artiste d’un rare talent, peu connu toutefois, à cause de son humeur sauvage, peu aimé généralement, à cause de ses opinions cassantes et absolues. Il passait pour un original. C’était bien le type solide du Franc-Comtois. Une figure carrée, énergique, où brillaient, comme des éclairs, deux petits yeux gris observateurs et profonds. Une stature solide comme son caractère. Il mangeait solidement, buvait solidement, fumait solidement des pipes solides, et aimait solidement quand il aimait, ce qui était assez rare. Son esprit était carré comme sa figure.

Par une atroce plaisanterie du sort, lui, l’amant du beau et des lignes pures, il avait eu le nez cassé